C’est à la faveur d’un voyage à Singapour que je découvre qu’il suffit d’une vraie vision et finalement de peu de temps pour faire passer un pays d’une destination de transit à une vraie destination touristique. Récit. Par Amel DJAIT
Singapour est un rocher de 42 kilomètres d’est en ouest habité par 5 millions d’habitants(.¾ chinoise mais aussi malaise et indienne) Tous les ans, l’île récupère entre 1 et 2 kilomètres carrés sur la mer et même si la ville-État n’est déjà plus le premier port mondial de transbordement de conteneurs, dépassée par Shanghai, elle a su bien préparée à cette perte.
L’économie du pays repose sur les services bancaires et financiers (deuxième place financière d’Asie après le Japon), le commerce, la navigation, le tourisme, les chantiers navals et le raffinage du pétrole (troisième raffineur mondial). Longtemps taxée de ville ennuyante et sans attraits significatifs, Singapour est aujourd’hui une destination touristique à part entière qui a drainé plus de 16,4 millions de touristes en 2016. L’Indonésie est encore la principale source de visiteurs devançant la Chine, la Malaisie, l’Inde et l’Australie. Mais le chiffre le plus important à retenir est les dépenses par visiteur. Celui-ci a atteint 24,8 milliards de dollars de Singapour (environ 17 milliards d’euros) en 2016. Une nette augmentation de 23% par rapport à 2015.
En moins d’une décennie, la ville Etat a opéré des changements drastique avec notamment des grands chantiers largement réfléchis: Le Marina Life Parc, ouvert en 2012, et qui est aujourd’hui l’un des plus grands aquariums du continent asiatique. Le Gardens by the Bay, jardin botanique où il y’a la plus grande collection d’orchidées au monde sans oublier l’hôtel, devenu symbole ou emblème du pays, le Marina Bay, un hôtel qui redessine la face de Singapour avec notamment une piscine à 220 m de haut qui permet une vue imprenable à 360 °.
L’hôtel repose sur trois tours de 55 étages surplombées par la fameuse immense piscine et un parc de 1,2 hectare. Quand l’idée d’un pareil édifice a commencé à germer, l’objectif était de créer une icône reconnaissable dans le monde entier. Quelques 6 milliards de dollars plus tard, le pari est gagné. L’hôtel emploie plus de 9000 employés et a réussi à redessiner la face de la ville avec un casino, un centre de conférence, des musées, un son et lumières tous les soirs, des théâtres, 2500 chambres ….
On ne peut plus clair!
Il va de soit que pareils résultats sont révélateurs d’une chose et une seule. Avec une vision claire, le destin d’une destination, que dire d’une destination touristique, peut changer et rapidement.
En se promenant dans la ville, on ne peut que se demander ce qui manque à Tunis pour avoir un édifice emblème, pour avoir un son et lumières gratuit tous les soirs sur une des rives du lac de Tunis, de doter Chikly d’un véritable musée, de transformer l’hôtel du Lac en un centre artistique ou premier jardin connecté de cactus au monde…
Les idées sont nombreuses. Souvent elles ont été exprimées par des opérateurs, des visionnaires, des politiques, des investisseurs, mais toutes se fracassent contre la gouvernance, le refus du changement et les lois archaïques. La médiocrité et la sous exploitation de tout le potentiel de la Tunisie sont -ils une fatalité? Une révolution, des changements politiques et sociaux, l’émergence d’une nouvelle classe dirigeante et 7 années ne suffisent-ils pas?
Pour en revenir à Singapour une question s’impose: comment expliquer le succès?. Une réponse, possible, celle de Jacque Attali au Journal L’Express http://blogs.lexpress.fr/attali/2015/08/10/en-2050-cest-a-singapour-que-le-niveau-de-vie-sera-le-plus-eleve-de-toute-la-planete/ : « D’abord par un extraordinaire leadership, pérenne pendant 50 ans : un père fondateur lucide et incontesté, Lee Kuan Yew ; un exceptionnel architecte économique, le Dr Goh Keng Swee ; un philosophe politique, S. Rajaratnam, et un stratège culturel et militaire, George Yeo. Ensuite, une politique, stable depuis 50 ans, fondée sur trois principes : la méritocratie (choisir les meilleurs, d’où qu’ils viennent socialement et ethniquement) ; le pragmatisme (face à tout problème, ne pas se préoccuper d’idéologie et se contenter d’adapter et de reproduire la meilleure solution appliquée dans un autre pays) ; l’honnêteté (lutter impitoyablement contre la corruption) ».
A bon entendeur salut !