Révolution tunisienne : De la révolution au Musée Grévin ?

Ce trio des sages est-il en symbiose avec l’esprit et les revendications de la révolution et ces centaines de milliers de jeunes qui par désespoir sont descendus dans la rue pour crier leur haine d’un pouvoir qui a mal vieilli et qui a fini par les sacrifier ?

La jeunesse tunisienne constitue le quart de l’électorat tunisien. Ils sont  en fait 2, 4 millions d’individus âgés de 18 à 29 ans qui attendent qu’on les aide à affronter la précarité, le chômage et construire l’avenir à l’ère de l’économie numérique. Autrement dit, ils sont une bombe de plus en plus explosive à l’heure où la relance économique devient très difficile managé par un gouvernement qui vient d’être désavoué par S&P. La Tunisie vient d’être reléguée parmi les pays incapables de redresser leur économie et d’honorer leur dettes. Un camouflet pour le gouvernement Hamadi Jebali.

Dans ce contexte délicat, deux camps politiques s’opposent sans proposer et sans vrais débats. Comment vont-ils négocier un virage qui devient de plus en plus dangereux sans concertation? Vont-ils arriver à la phase de compétition politique nécessaire pour instaurer une vraie démocratie?  Qui a de vraies propositions pour la jeunesse et pour le pays?

La jeunesse grogne et veut travailler. Sans perspectives, elle s’impatiente et devient menaçante. Du côté des islamistes, une grande partie du vedettariat, du moins auprès des jeunes est volé par les salafistes. Dans le camp des modernistes, ces derniers dans leur débâcle arrivent à peine à être audibles et se perdent en chamailleries et en guerres intestine.

Dans un face à face qui cache à peine son nom et qui oppose Beji Caid Essebsi à Rached Ghannouchi, on retrouve une partie des raisons et de la manifestation de la désaffection de cette jeunesse à la chose politique. Si le premier et son équipe n’arrivent pas forcément à attirer les jeunes, ne sont-ils pas en train d’échapper au second et à sa mouvance ?

Bien qu’elle semble vitale, l’initiative de rassemblement de BCE manque d’une vraie approche régénératrice et innovante. L’image de la tribune de Monastir avec des militants sortis tout droit du musée Grévin a dérangé.Est-ce avec cette image et ce casting qu’il va être possible de rassembler ceux qui sont restés en dehors de l’ancienne machine salie par des années de corruption et d’abus de pouvoirs?

Après les élections et à quelques mois ( en principe) d’un nouveau rendez vous crucial pour la Tunisie, où sont les femmes et les hommes, les jeunes et les « nouveaux bourguibistes »? Une frange de tunisiens qui s’est révélée fortement attachée à cette conception de la Tunisie. Est-ce avec des  visages aguerris de politiques sortis du placard  que l’on va les convaincre d’adhérer à un modèle qui s’est essoufflé avec les années ZABA  et qui a repris du poil de la bête au lendemain du 14 Janvier? Que reste t-il de cette génération politiquement tuée par Bourguiba et /ou Ben Ali ? Une résurrection est-elle encore possible? Les partis modernistes sont en phase de gestation. On n’en voit pour le moment que la dimension « fusions  » /acquisitions » dans l’espoir d’une offre cohérente.

En face et dans le camp des islamistes, les données sont différentes. Le rajeunissement de la base se fait et en masse. Selon les observateurs, c’est Rached Ghannouchi qui n’a pas le poids moral nécessaire pour intimider une jeunesse qui trouve ses réponses dans dans l’islam sans forcément avoir un « lien » envers le dirigeant historique du parti Ennahdha.

Les déclarations des différents leaders Nahdhaouis témoignent de doigté pour ne pas dire de passivité envers ce que l’on appelle les « salafistes » qui ratissent large chez les jeunes. Ceux -ci dans leurs diverses composantes, déclarent leur opposition et confrontation avec le parti au pouvoir. Ceux qui considèrent que les salafistes posent le plus de problèmes au parti Ennahdha dans sa gestion des affaires de l’Etat et ceux qui pensent que c’est juste un dossier sécuritaire sans plus devront attendre l’évolution des prochaines semaines pour tirer les conclusions. Pour le moment, les manifestations de ces groupuscules se multiplient. Spectaculaire, le dernier congrès des « Partisans de la Chariia » a donné un aperçu de leur poids.

Face à cela, la jeunesse peine à trouver ses marques. La politique est assurément un luxe que ne peuvent se permettre que les riches et les retraités! Militer pour les jeunes semble loin de leurs préoccupations. Ils ont déjà bien assez de difficultés pour affronter un quotidien difficile et un avenir incertain.

On dit souvent que c’est à plus de 80 ans, que l’on a réponse à tout. Sauf que c’est aussi un âge où presque plus personne ne pose de questions y compris à des « vieux sages ». Les réponses à cette jeunesse qui attend viendront-elles des vieux sages ou par le biais de nouveaux loups de la politique? Les « challengers » ont besoin de temps pour se hisser.Passer le relais nécessite des structures adaptées, un esprit constructif et du temps. Un temps que ni le pays ni la jeunesse ne peut encore donner.

Mêmesi on dit qu’il y a un âge limite à la maternité via la ménopause, un âge limite au travail via la retraite, ne convient-il pas de se demander s’il ne faut pas un âge limite en politique ? Pour le moment, nous avons surtout droit à des révolutionnaires retardés. Prenons les solutions là où elles se trouvent. Au vu de la dérive de la Tunisie, il ne reste qu’à espérer que nos chefs soient plus proche de la sagesse que de l’âge de la retraite!

Amel Djait

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